Alma from La Lenteur de l’aube

Written in French by Anne Brécart

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Ce 4 juillet, alors que nous roulons sur la route de campagne, j’ai envie de dire à Alma combien je suis fatiguée de ma vie d’adulte. Mais je ne trouve pas les mots. Elle a toujours ce regard lisse et indifférent qui fait comme un mur entre elle et moi. Je n’ose pas lui demander comment elle va, si elle est heureuse.  Cela parait trop tôt pour avoir des conversations aussi intimes. Je trouve plus rassurant d’être près d’elle sans parler, comme autrefois.

En roulant, je me suis souvenue d’un village au bord de la mer et entouré de forêts. J’avais aimé entendre à la fois le chant des oiseaux et le ressac. Nous avions dormi dans un Bed and Breakfast, le propriétaire nous avait apporté une tasse de thé tôt le matin, sans doute avait-il eu peur que nous restions toute la matinée au lit.

Les roues en pente menaient au port et le silence qu’il y avait dans ce village était très ancien, on sentait qu’il n’avait jamais été rompu.

Alma a ri quand je lui ai dit cela.

― Parce que tu crois qu’il y a des silences différents les uns des autres. Le silence c’est toujours une absence de bruits, non ?

Mais moi j’ai maintenu que c’est comme les forêts, il y a les forêts primaires qui existent depuis le début des temps et les autres. Le silence, c’est pareil. Il existe des silences très particuliers qui n’ont jamais été déchirés par des bruits de moteurs. Ils sont plus épais, ils ont la consistance du velours bleu nuit un peu usé par le temps.

Alma a ri encore et nous avons traversé la campagne au rythme de nos souvenirs qui remontaient doucement comme des bulles du fond d’une eau peu profonde.

Et, bien que la campagne se fût couverte de petites villas, que les chemins de terre aient été transformés en routes, j’avais l’impression d’être revenue dans le passé.

La route descend doucement, nous avons pédalé avec facilité. Au loin le lac scintille dans la lumière trop dure de cet après-midi. Le miroir de l’eau est immobile, ce n’est pas un élément liquide qui s’étend là mais une surface solidifiée. Des Bouffées de chaleur montent de la terre et dégagent la même odeur que le corps d’un cheval. Quelque chose de sucré et de sec.

Plus nous nous approchions du village de son enfance, plus le visage d’Alma s’éclairait.

― Je me sens tellement vivante depuis que je suis avec toi, me dit-elle avec ce demi-sourire que je lui connaissais si bien.

Avant que j’aie eu le temps de lui demander ce qu’elle voulait dire par là, nous nous sommes engagées sur un chemin de terre. Notre passage soulevait un mince rideau de poussière. J’ai suivi ce ruban jaune clair qui flottait à quelques mètres devant moi et me suis sentie étrangement apaisée, comme si le fait d’être en présence d’Alma me redonnait confiance en l’instant. Cet après-midi, sur ce petit chemin, le temps était en équilibre, il respirait à un rythme régulier et tranquille. Je voyais le dos d’Alma, ses longues jambes nues qui montaient et descendaient, appuyant sur les pédales et cela me remplissait d’une paix qui me surprenait moi-même parce que je ne l’avais pas recherchée, pas espérée, je ne savais même pas qu’un tel sentiment pût exister.

La route descendait doucement à travers les vignes. Le paysage autour de nous devenait plus doux. Le scintillement du lac était atténué par les branches des arbres, le tracé du chemin était plus sinueux, il se perdait parfois dans un creux du paysage. Ici et là une maisonnette en bois jouxtait un parchet de vigne. Les routes, les voitures, les nouveaux lotissements semblaient n’avoir jamais existé.

J’ai reconnu la ferme de loin au but d’une allée de noyers. Nous sommes arrivées dans la cour qui était plus propre que dans mon souvenir, sans doute parce qu’il n’y avait plus de bêtes dans l’étable en face de la maison d’habitation.

Alma n’avait pas l’air d’être empruntée, elle avançait dans la pénombre de la maison comme si elle y venait encore quotidiennement pour prendre le goûter. Elle a poussé la porte de la cuisine en appelant Valentine. Je la suivais mal à l’aise et heureuse à la fois. Je reconnaissais les quatre panneaux des armoires sur lesquels quelqu’un avait peint le même paysage, une fois sous la neige, une fois dans une tempête d’automne, sous le soleil de printemps et en été.

― Elle doit être un peu sourde, c’est pourquoi elle ne nous entend pas.

Je suivais toujours, un peu apeurée. Dans la salle à manger la lampe à suspension était allumée et éclairait la table sur laquelle il y avait une bande de dentelles blanches épinglée sur un coussin.

Alma m’a fait signe depuis l’autre porte qui donnait sur un jardin d’agrément. Une petite table ronde était dressée à l’ombre d’un pin parasol. La maison derrière nous était peinte en rose pâle comme enveloppé d’un éternel rayon de soleil couchant.

Un gros pot de sirop, des verres et des biscuits nous attendaient. Valentine était assise dans un vieux fauteuil de jardin, elle nous a vues arriver, s’est levée pour nous accueillir.

— Ah voilà les jeunes filles. Quel plaisir de vous voir.

C’était si rassurant de rajeunir sous son regard. Je me trouvais reportée en arrière, quand nous avions encore toute la vie devant nous. Quand notre existence était encore indéfinie. J’aurais voulu qu’elle reste ainsi, juste nous deux dans le train entre Thurso et Édimbourg qui glissait à travers le paysage sans l’entamer.

Valentine nous a prises par la main, nous avons formé un cercle autour de la petite table verte. Elle nous regardait en souriant. Ses yeux rougis et larmoyants me faisaient penser aux yeux de certains chiens aux paupières lourdes.

— Mangez, mangez mes petites filles. Qu’est-ce que cela me fait plaisir de vous revoir. C’est comme il y a trente ans quand vous veniez prendre le goûter. Maintenant l’étable est vide, et il n’y a plus de paille dans la grange mais de vous avoir là ça me fait un plaisir, vous ne pouvez pas savoir. C’est fou.

Que Valentine, toute recroquevillée dans son fauteuil et qui, de ses mains minuscules de petite fille vieillie, nous servait du sirop, puisse trouver quelque chose « fou » m’a paru irrésistiblement drôle et en même temps cela m’a fait monter les larmes aux veux.

Quelque part très loin, nous avons entendu le train traverser la plaine ; le train, les voyages, tout cela semblait derrière nous, comme dans une autre vie. De là où nous étions assises, nous voyions un chemin longeant les vignes sulfatées et l’arbre sous lequel nous avions joué il a longtemps. Une balançoire était toujours accrochée à une branche du chêne, maintenant nous étions trop grandes pour nous balancer mais nous n’avions plus besoin de le faire puisque nous avions le souvenir et cela suffisait.

Je ne me rappelle plus combien de temps nous sommes restées autour de la petite table verte. Valentine avait passé en revue tous les anciens voisins d’Alma, les naissances, les morts, les mariages et les séparations.

Valentine s’était toujours occupée de la maison, de ses enfants, de son mari. À faire à manger pour ceux qui venaient leur rendre visite et qui s’attablaient dans la grande cuisine pleine d’ombre. Que restait-il de toute cette vie, de ces allées et venues dans la grande maison devenue silencieuse? Est-ce qu’Alma aurait été d’accord avec moi qu’ici c’était encore une autre sorte de silence qui s’était installé?

Puis nous avons été faire le tour du jardin et Valentine nous a présenté les arbres un à un. Chacun d’eux avait un nom et était le frère végétal d’un de ses enfants.

— Et quand Yves a été malade, son arbre a perdu ses feuilles. Je vous assure. Heureusement l’un et l’autre ont guéri.

Elle marchait entre nous, frêle silhouette avançant lentement mais avec détermination et quand elle parlait, j’oubliais son âge; les mots dans sa bouche n’avaient pas vieilli.

Nous sommes restées jusqu’au moment où la terre restitue la chaleur engrangée pendant la journée. Des champs de blé montait un parfum chaud et sucré. Alma avait l’air absent. Valentine parlait d’une piscine dont nous pouvions profiter si le cœur nous en disait.

— Mais nous n’avons pas pris nos costumes de bain.

De toute façon, il était l’heure de partir si nous voulions rentrer avant la nuit. Sur le seuil de la porte Valentine nous a dit, toute joyeuse:

— Eh bien, quand vous reviendrez l’été prochain, je vous donnerai la clé pour la piscine et vous n’oublierez pas vos costumes de bain, n’est-ce pas?

Comme si après cette visite je pouvais encore imaginer un avenir.

Sur le chemin du retour nous avons pédalé en silence. Arrivée aux abords de la ville, Alma a posé un pied par terre, elle est restée un long moment à regarder les couleurs du couchant.

— C’était bien de revenir ici. Je ne sais pas pourquoi, ici je me sens plus réelle. Peut-être n’est-on pas la même personne d’un pays à l’autre, d’un continent à l’autre.

J’ai cru qu’elle souriait. Il devait être plus tard que ce que j’avais imaginé car il était déjà difficile de distinguer les champs de blé des champs d’herbe dans l’obscurité croissante, tout comme il était difficile de distinguer entre un sourire et un sanglot. La campagne autour de moi sentait la paille et l’avoine comme le corps d’un cheval frémissant. J’étais un moucheron sur ce corps immense qui galopait à travers l’univers ; j’étais là sans douter une seule seconde de mon bon droit de me promener sur cette bête chaude lancée au milieu des étoiles.

— Alma je voulais te poser une question, j’aurais dû te la poser ce matin déjà mais j’étais tellement contente de te voir que je ne voulais pas abîmer cet instant. Tu sais, je n’ai pas compris pourquoi tu t’es suicidée. Dis-moi pourquoi tu as fait cela.

Je me suis retournée pour voir le visage d’Alma mais il n’y avait plus personne, seulement la nuit qui s’était levée et qui secouait sa jupe remplie d’étoiles.

Excerpted from La Lenteur de l’aube, Editions Zoé, 2013
© Editions Zoé, 2013

Alma from La lentezza dell'alba

Written in French by Anne Brécart


Traduzione di Carlotta Bernardoni Jaquinta

Quel 4 luglio, mentre pedaliamo sulla strada di campagna, ho voglia di dire ad Alma quanto sono stanca della mia vita da adulta. Ma non trovo le parole. Ha sempre quello sguardo piatto e indifferente che crea come un muro fra lei e me. Non oso chiederle come sta, se è felice. Sembra troppo presto per delle conversazioni così intime. Trovo più rassicurante esserle vicino senza parlare, come allora.

Pedalando, mi sono ricordata di un paese sul bordo del mare circondato dai boschi. Mi era piaciuto sentire il canto degli uccelli contemporaneamente alla risacca. Avevamo dormito in un Bed and Breakfast, il proprietario ci aveva portato una tazza di tè al mattino presto, senz’altro per paura che restassimo tutta la mattina a letto.

Le strade in pendenza portavano al porto e il silenzio che c’era in quel paese era molto antico, si sentiva che non era mai stato spezzato.

Alma ha riso quando gliel’ho detto.

– Perché pensi che ci sono dei silenzi diversi gli uni dagli altri. Il silenzio è sempre assenza di rumore, no?

Ma io ho continuato a sostenere che è come coi boschi, ci sono i boschi primari che esistono dall’alba dei tempi e ci sono gli altri. Col silenzio, è lo stesso. Esistono silenzi molto particolari che non sono mai stati interrotti da rumori di motori. Sono più spessi, hanno la consistenza del velluto blu notte un po’ consunto dal tempo.

Alma ha riso di nuovo e abbiamo attraversato la campagna al ritmo dei ricordi che tornavano a galla dolcemente come bolle dal fondo di un’acqua poco profonda.

E, malgrado la campagna si fosse coperta di villette e i sentieri fossero stati trasformati in strade, avevo l’impressione di essere tornata nel passato.

La strada scende dolcemente, abbiamo pedalato con facilità. Lontano il lago scintilla nella luce troppo dura di quel pomeriggio. Lo specchio d’acqua è immobile, non è un elemento liquido che si estende ma una superficie solidificata. Vampate di calore si alzano dalla terra e sprigionano lo stesso odore del corpo di un cavallo. Qualcosa di zuccherato e secco.

Più ci avvicinavamo al paese della sua infanzia, più il viso di Alma s’illuminava.

– Mi sento talmente viva da quando sono con te, mi dice con quel mezzo sorriso che conoscevo così bene.

Prima che avessi avuto il tempo di chiederle cosa intendesse dire, abbiamo svoltato in un sentiero. Il nostro passaggio sollevava un sottile velo di polvere. Ho seguito quel nastro giallo chiaro che svolazzava qualche metro davanti a me e mi sono sentita stranamente appagata, come se il fatto di essere in presenza di Alma mi ridesse fiducia nell’istante. Quel pomeriggio, lungo quel sentiero stretto, il tempo era in equilibrio, respirava con ritmo regolare e tranquillo. Vedevo la schiena di Alma, le sue lunghe gambe nude andare su e giù, spingendo sui pedali e questo mi riempiva di una serenità che mi sorprendeva proprio perché non l’avevo cercata, sperata, nemmeno sapevo che un sentimento del genere potesse esistere.

La strada scendeva dolcemente attraverso i vigneti. Il paesaggio attorno a noi diventava più dolce. Lo scintillio del lago era attenuato dai rami degli alberi, il tracciato del sentiero più sinuoso. A tratti spariva dentro un avvallamento del paesaggio. Qua e là una casetta in legno fiancheggiava un piccolo vigneto. Le strade, le macchine, i nuovi lotti sembrava non fossero mai esistiti.

Ho riconosciuto la fattoria da lontano, sul finire di un viale di noci. Siamo arrivate nella corte che era più pulita di quanto ricordassi, senza dubbio perché non c’erano più bestie nella stalla davanti alla casa padronale.

Alma non sembrava a disagio, avanzava nella penombra della casa come se ci venisse ancora ogni giorno a far merenda. Ha spinto la porta della cucina chiamando Valentine. La seguivo imbarazzata e felice allo stesso tempo. Riconoscevo le quattro ante degli armadi sui quali qualcuno aveva dipinto lo stesso paesaggio, prima sotto la neve, poi in una tempesta d’autunno, sotto il sole di primavera e in estate.

– Dev’essere un po’ sorda, per questo non ci sente.

Continuavo a seguirla, un po’ titubante. Nella sala da pranzo la lampada a sospensione era accesa e illuminava la banda di pizzo bianco appuntata con gli spilli al cuscino sul tavolo.

Alma mi ha fatto segno dall’altra porta che dava sul giardino ornamentale. Un tavolino rotondo era installato all’ombra di un pino parasole. La casa dietro di noi era dipinta di un rosa pallido come avvolta da un eterno raggio di sole calante.

Una grande brocca di sciroppo, dei bicchieri e dei biscotti ci aspettavano. Valentine era seduta in una vecchia poltrona da giardino, ci ha viste arrivare, si è alzata per accoglierci.

– Ah ecco le ragazze. Che piacere rivedervi.

Era così rassicurante ringiovanire sotto il suo sguardo. Mi trovavo trasportata indietro nel tempo, quando avevamo ancora tutta la vita davanti. Quando la nostra esistenza era ancora indefinita. Avrei voluto che restasse così, solo noi due nel treno fra Thurso e Edimburgo che scivolava dentro il paesaggio senza scalfirlo.

Valentine ci ha prese per mano, abbiamo formato un cerchio attorno al tavolino verde. Ci guardava sorridendo. I suoi occhi arrossati e lacrimanti mi facevano pensare agli occhi di certi cani dalle palpebre pesanti.

– Mangiate, mangiate bambine mie. Che piacere mi fa rivedervi. È come trent’anni fa, quando venivate a far merenda. Adesso la stalla è vuota, e non c’è più paglia nel fienile ma vedervi qui mi fa un tale piacere, non potete immaginare. È assurdo.

Che Valentine, tutta rannicchiata nella sua poltrona, con le sue minuscole manine da vecchietta bambina a servirci lo sciroppo, potesse considerare qualcosa “assurdo” mi è sembrato irresistibilmente divertente e allo stesso tempo mi ha fatto salire le lacrime agli occhi.

Da qualche parte molto lontano abbiamo sentito il treno attraversare la pianura; il treno, i viaggi, tutto questo sembrava ormai alle spalle, come in un’altra vita. Da lì dov’eravamo sedute vedevamo un sentiero costeggiare le vigne spruzzate di solfato e l’albero sotto il quale avevamo giocato tempo fa. L’altalena era ancora appesa a un ramo della quercia, ora eravamo troppo grandi per dondolarci ma non ce n’era più bisogno perché ne avevamo il ricordo e questo bastava.

Non so più quanto tempo siamo rimaste al tavolino verde. Valentine aveva passato in rassegna tutte le vecchie vicine di Alma, le nascite, le morti, i matrimoni e le separazioni.

Valentine si era sempre occupata della casa, dei bambini e del marito. A far da mangiare per quelli che venivano a farle visita e che si mettevano a tavola nella grande cucina piena d’ombra. Cosa restava di tutta quella vita, di quei va e vieni nella grande casa diventata silenziosa? Alma sarebbe stata d’accordo con me che era ancora un altro tipo di silenzio quello che si era installato qui?

Poi siamo andate a fare il giro del giardino e Valentine ci ha presentato gli alberi uno a uno. Ognuno di loro aveva un nome ed era il fratello vegetale di uno dei suoi figli.

– E quando Yves si è ammalato, il suo albero ha perso le foglie. Davvero. Per fortuna sono guariti entrambi.

Camminava fra noi due, delicata sagoma che avanzava lentamente ma con determinazione e quando parlava dimenticavo la sua età; le parole nella sua bocca non erano invecchiate.

Siamo rimaste fino al momento in cui la terra restituisce il calore accumulato durante la giornata. Dai campi di grano saliva un profumo caldo e zuccherato. Alma aveva l’aria assente. Valentine parlava di una piscina di cui avremmo potuto approfittare se ne avessimo avuto voglia.

– Ma non abbiamo preso il costume.

In ogni caso era ora di andare se volevamo tornare prima di notte. Sulla soglia Valentine ci ha detto, tutta felice:

– Beh, quando tornerete l’estate prossima vi darò la chiave per la piscina e voi non dimenticherete il costume da bagno, intesi?

Come se dopo quella visita potessi ancora immaginare un futuro.

Al rientro abbiamo pedalato in silenzio. Arrivate ai confini della città Alma ha poggiato un piede a terra, rimanendo a lungo a guardare i colori del tramonto.

– È stato bello tornare qui. Non so perché, qui mi sento più reale. Forse non siamo la stessa persona da un paese all’altro, da un continente all’altro.

Mi è sembrato che sorridesse. Doveva essere più tardi di quanto avessi immaginato perché era già difficile distinguere i campi di grano da quelli d’erba nell’oscurità crescente così com’era difficile distinguere un sorriso da un singhiozzo. La campagna attorno a me sapeva di paglia e d’avena come il corpo di un cavallo fremente. Ero un moscerino su quel corpo immenso che galoppava attraverso l’universo; ero là senza dubitare un solo istante del mio diritto di passeggiare su quella bestia calda lanciata fra le stelle.

– Alma volevo chiederti una cosa, avrei dovuto chiedertela già questa mattina ma ero talmente contenta di vederti che non volevo rovinare il momento. Sai, non ho capito perché ti sei suicidata. Dimmi perché l’hai fatto.

Mi sono girata per vedere il viso di Alma ma non c’era più nessuno, soltanto la notte che si era alzata e che scrollava la sua gonna ricolma di stelle.

Excerpted from La Lenteur de l’aube, Editions Zoé, 2013
© Editions Zoé, 2013
© Specimen, 2017


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