Un pont, une lagune, quelques immeubles, forêt, forêt, forêt… Le grand défilé du paysage m’est aussi étranger que le repas du perfide. La route fait le serpent noir dans la forêt inexplicable. De loin, on croit que les arbres le coupent. De près, il laisse un tunnel de vert à la voiture chemise brune. La seule forêt que j’ai vue est dans le parc où quelques fois, avec Maman, on part à dos de moto bombardier de paix, une Vespa rouge fabriquée en tôle, en roues et en démarreurs des bombardiers de guerre qui n’ont plus rien à faire en l’air en temps de paix. On doit reconvertir les chars de guerre en tracteurs, les canons de guerre en creusets, les balles de guerre en batteries, les avions de guerre en souffleurs, les généraux de guerre en ingénieurs, et encore plein d’autres choses de guerre en choses de paix, dit Maman. On doit mettre toutes les choses de guerre dans les mains des ouvriers et des paysans révolutionnaires pour faire plier tous les bourgeois compradors du monde. Pour ceux qui ne sont pas assez souples, pendules publiques et exécutions sur les chaises du cimetière, dit Camarade Papa. Maman et Camarade Papa sont toujours en deux accords. C’est idéal pour les cris du peuple souverain les rares fois qu’ils sont ensemble. La forêt de mon parc est très disciplinée avec ses arbres droits en rangs de grands défilés. Les fois où Maman ne fatigue pas trop, on joue à cache-cache et on se retrouve. Dans cette forêt qui ressemble à celle de la tribu des Boni-marrons du Surinam, Maman va me perdre. Seule Yolanda pourra me retrouver.

Dans la Fiat chemise brune sur le serpent noir au milieu de la forêt, Émile parle de Camarade Papa avec les nerfs. Il veut qu’il arrête de vouloir changer le monde, mais qu’il se change lui-même. Je pense sur moi qu’il ne sait pas que Camarade Papa a tellement de chemises haut col Mao qu’il peut en distribuer au monde entier. Émile raconte qu’on n’élève pas un enfant comme on élève un singe savant. Émile ne comprend pas pourquoi Camarade Papa ne les a pas prévenus du jour exact de mon arrivée. Moi je comprends. Manoeuvre de diversion. Mais je ne dis rien. Geneviève parle de Maman avec le coeur et les traits molo dans sa voix. Elle dit que je lui ressemble beaucoup. Que nous avons les mêmes yeux. Que je suis blanc comme elle. Elle a raison et demie. On me dit toujours que des yeux, je ressemble à Maman. Mais comme les autres, Geneviève a un grave problème de couleur. Elle a même un projet de peinture sur moi. Elle dit que si on me colorie le visage en noir très foncé, je ressemble de la tête exactement à un certain Nanan Alloua-Treissy. Geneviève a aussi un problème de taille. Chaque fois que le grand défilé de la forêt est interrompu par quelques maisons, elle dit qu’on traverse une ville. Je sais bien qu’une ville ne peut jamais être aussi petite. Mais je ne dis rien. Après quelques heures de voiture fasciste, le soleil joue à cache-cache derrière les arbres de la forêt inexplicable. Il finit par se perdre et c’est le noir. Je n’ai plus rien à voir. Émile et Geneviève se taisent de silence. Je n’ai plus rien à entendre. J’ai passé deux journées révolutionnaires à vous fatiguer des leaders plus maximaux que le camarade Fidèle Cigare. Je me dors. Je ne me rappelle pas à quel moment on arrive à Assikasso.

Un ponte, una laguna, qualche costruzione, foresta, foresta, foresta… La grande parata del paesaggio mi è sconosciuta quanto il pasto del perfido. La strada fa un serpente nero nella foresta inesplicabile. Da lontano si direbbe che gli alberi lo tagliano. Da vicino, apre una galleria di verde alla macchina camicia bruna. L’unica foresta che ho mai visto sta nel parco dove con la mamma ogni tanto ce ne andiamo sullo scooter bombardiere di pace, una Vespa rossa fatta di lamiere, ruote e motorini per bombardieri da guerra che in tempo di pace per aria non hanno più niente da fare. Bisogna riconvertire i carri da guerra in trattori, i cannoni da guerra in crogioli, le palle da guerra in batterie, gli aerei da guerra in soffiatori, i generali da guerra in ingegneri, e tante altre cose da guerra in cose da pace, dice la mamma. Bisogna mettere tutte le cose da guerra in mano agli operai e ai contadini rivoluzionari per piegare i borghesi comprador di tutto il mondo. Per quelli non abbastanza flessibili, pubblica appensione ed esecuzioni sulle sedie del cimitero, dice il compagno papà. La mamma e il compagno papà sono sempre due campane. Le rare volte che sono una sola, per le grida del popolo sovrano è l’ideale. La foresta del mio parco è molto disciplinata, coi suoi alberi sull’attenti in ranghi da grande parata. Le volte in cui la mamma non è troppo stanca giochiamo a nascondino e ci ritroviamo. In questa foresta che sembra quella dei bonimarroni del Suriname la mamma mi perderebbe. Solo Yolanda potrebbe ritrovarmi.

Nella Fiat camicia bruna lungo il serpente nero in mezzo alla foresta, Émile parla del compagno papà coi nervi. Vuole che la smetta di voler cambiare il mondo, e che piuttosto si cambi lui. Io di mio penso che lui non lo sa, ma il compagno papà ha tante di quelle camicie alla coreana del nord che potrebbe distribuirne al mondo intero. Émile dice che non si alleva un bambino come si alleva una scimmietta ammaestrata. Émile non capisce perché il compagno papà non gli ha comunicato il giorno esatto del mio arrivo. Io lo capisco. Manovra diversiva. Però non dico niente. Geneviève parla della mamma col cuore e la voce sprezzati. Dice che le assomiglio molto. Che abbiamo gli stessi occhi. Che sono bianco come lei. Ha ragione e più d’una. Mi dicono sempre che di occhi assomiglio alla mamma. Ma come tutti gli altri Geneviève ha un grave problema di colore. E su di me ha perfino un progetto di pittura. Dice che se mi colorano la faccia di nero molto scuro, di faccia assomiglio preciso a un certo Nanan Alloua-Treissy. Geneviève ha anche un problema di rilievo. Ogni volta che la grande parata della foresta è interrotta da qualche casa, dice che attraversiamo una città. Io so benissimo che una città non potrà mai essere così piccola. Però non dico niente. Dopo qualche ora di macchina fascista, il sole inizia a giocare a nascondino dietro gli alberi della foresta inesplicabile. Alla fine si perde e si fa buio. Non ho più niente da vedere. Émile e Geneviève calano il silenzio. Non ho più niente da sentire. Ho passato due giorni rivoluzionari a sfiancare dei leader più massimali del compagno Fedel Sigaro. Mi assonno. Non mi ricordo del momento in cui arriviamo ad Assissako.